Du lundi 6 au Mercredi 8 août, le groupe des immergés, accompagné des représentants des partenaires guatémaltèques, s'est divisé en trois groupes pour s'immerger un peu plus.

Récit des groupes: SERAPAZ, DESMI, FRAYBA.

Immersion avec SERAPAZ:

Le lundi 6 aout, le groupe « SERAPAZ » composé de Monique, Marie-Noëlle, Renée, Bruno, Marie Hélène, Anne Gaëlle, Fabien accompagnés par Marie la traductrice et Mario, Miguel et Luiz du bureau de SERAPAZ au Chiapas, a fais le voyage de Ocosingo jusqu’à Tenosique à la frontière avec le Guatemala.

Après plus de quatre heures de route agrémentées par des chants mexicains et français, nous sommes allés à la rencontre de l’équipe du Père Thomas qui s’occupe d’un refuge pour des migrants. Ce refuge se nomme refuge 72. Les migrants qui sont accueillis sont pour la plupart des jeunes venus du Guatemala, du Salvador, de l’Honduras avec souvent rien d’autre avec eux qu’un t-shirt et le peu d’affaires que les obstacles de leur périple courageux a bien voulu leur laisser. Nous avons été marqués notamment par le témoignage d’un jeune venu du Salvador suite à la mort de sa famille la plus proche. Il tenait à nous montrer que les jeunes migrants ne sont pas des délinquants contrairement aux préjugés existants mais au contraire des jeunes parfois diplômés, lui-même ayant une formation dans la gestion d’entreprise. L’autre témoignage marquant fut celui de Martha, une jeune guatémaltèque cherchant à gagner les Etats Unis pour trouver un travail et des meilleures conditions de vie. Elle nous a expliqué toutes les difficultés qu’elle a pu rencontrer, face à la précarité et le danger qui les menacent à chaque déplacement, autant que la politique de migrations du Mexique.

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Nous avons pu découvrir le fonctionnement du refuge,  en discutant avec Thomas et Yolande, une volontaire parmi d’autres au service des jeunes migrants. Les membres du refuge sont animés par une solidarité et une fraternité lorsqu’ils aident les jeunes pour leur démarche administrative, mais aussi se nourrir, se loger. Cette organisation soutenue par l’Eglise et la pastorale des migrants, vise à protéger aussi des autorités mexicaines souvent corrompues et les cartels profitant de la situation des migrants pour les racketter.  Ce refuge accueille en général entre 100 à 150 migrants par jour qui arrivent par le train passant par Tenosique et qui n’ont d’autre choix que de le reprendre pour aller vers le nord du Mexique. Mais ce train est  dangereux pour eux à force de nombreuses raisons les plus effrayantes que les autres.

Le lendemain, après avoir pris au passage Thomas, Martha et Yolanda au refuge, nous sommes allés rencontrer une Communauté de Guatémaltèques qui vit dans un campement, littéralement sur la frontière entre le Mexique et le Guatemala. Cette communauté s’est installée à cet endroit suite au passage de l’ouragan Mitch sur leurs terrains détruisant maisons et cultures. Mais cette communauté se trouve sur une réserve naturelle décrétée par le gouvernement Guatémaltèque. Ce dernier les accuse de différents méfaits, atteinte à la réserve naturelle et coopération avec des narcotrafiquants. Ces accusations comme nous l’ont confirmé nos partenaires sur le terrain sont montées de toutes pièces pour justifier des expulsions et déplacements forcés de la communauté. D’après la description faite de l’intervention des autorités, la violence utilisée nous permet de penser que les droits de l’homme ont été bafoués, tout comme la constitution du Guatemala qui veut que toute population a le droit de s’installer autour de la réserve naturelle. D’après la description faite par l’assemblée de la communauté, nous sommes rendu compte du jeu de dupes de l’Etat mexicain et guatémaltèque, alternant aide humanitaire et déplacements forcés.

Nous avons appris que des négociations avaient lieu avec des représentants guatémaltèques, mais leurs propositions de déplacer la communauté vers des terrains d’une grandeur et qualité

insuffisantes pour assurer l’autonomie alimentaire de toutes les familles, alors même que la communauté accepte l’idée de se déplacer.

Nous avons fini la réunion avec les membres de la communauté, par une description très concrète de leurs situations alimentaires, sanitaires et par un tour dans l’ensemble de la communauté. Toutefois nous avons été marqués par la chaleur de leur accueil, et par la vivacité des enfants de la communauté.

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Suite à cette rencontre marquante par la complexité du jeu des acteurs en cause, de la précarité de la communauté, nous avons pu nous rendre compte de l’ampleur de la tâche à accomplir par SERAPAZ , dans la mission civile d’observation et la médiation entre les différentes parties.

Après cette expérience unique, nous avons repris la route pour Ocosingo, où suite au repas, une rencontre avec le Père Nelson nous attendait. Nous sommes donc retrouvés dans la belle Eglise d’Ocosingo, avec le père Nelson, qui nous a décrit  son travail auprès des communautés indigènes,  l’aide primordiale des diacres, comme le rôle important des catéchistes. Le rôle de l’Eglise, inspiré par Don Samuel et la Théologie de la Libération, est foncièrement important dans la médiation entre communautés, et avec les autorités. Il nous aussi exprimé la difficulté de rejoindre de manière régulière des jeunes et de renouveler la présence de prêtres dans les communautés de part les conditions de vie compliquées.

 Le lendemain matin, avant le départ pour retourner à San Cristobal de las Casas, nous sommes allés à la rencontre d’une organisation paysanne nommée l’ARIC, association rurale des intérêts collectifs, composée des membres de trois communautés que le gouvernement mexicain veut déplacer car elles se trouveraient proches d’une réserve naturelle, et dans une zone vouée au tourisme. La situation nous semblait complexe, car elle assemble intérêt d’un territoire appartenant aux indigènes et territoire administré par le gouvernement. Ils nous ont aussi exposé les problèmes rencontrés pour maintenir l’unité des communautés face au gouvernement  de part une intervention extérieure n’ayant pas respecté les coutumes et les relais nécessaires pour venir imposer ses idées à une des communautés. Cette problématique nous a confortés dans l’esprit du CCFD Terre Solidaire qui travaille toujours en partenariat avec les associations locales. Nous leur avons exprimé notre soutien dans leur lutte, mais aussi que nous espérions les aider en communiquant autour de leur situation.

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Avant le grand départ de Ocosingo, nous sommes passés au bureau de SERAPAZ, pour dire en revoir à toute l'équipe de salariés qui agit avec beaucoup d'énergie pour résoudre les conflits que les communautés indigènes de la région connaissent. Nous avons fêté cet en revoir autour de quelques spécialités locales. Nous tenons à redire nos remerciements pour l'organisation, les superbes discussions autour des problématiques qu'ils rencontrent chez eux et toutes ces belles rigolades.

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Après deux jours intenses nous avons repris la route pour San Cristobal où nous avons pu profiter du reste de la journée pour découvrir le marché et les spécialités locales.

Groupe SERAPAZ.

 Immersion avec DESMI:

Lundi matin, nous avons pris la route avec l'association DESMI en direction de la forêt Lancadone où se trouve quelque part la Caracole de Roberto Barrioz. Après huit heures de route , de topes(dos d'âne locaux) et de virages nous avons pu discuter avec les partenaires mexicains et guatémaltèques de choses sérieuses et de « bromas ».

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Cette caracole se situe au milieu de la jungle d'où des cris de singes hurleurs, un opéra de végétation, une rivière magnifique, des moustiques, une très grosse chaleur … et un équipement sanitaire plus que précaire ! Ça ne fait rien, au contraire, le hamac sera donc la literie du soir pour les filles. Galanterie oblige, les garçons ont dormi par terre. Bien évidemment, nous avons travaillé à comprendre un autre fonctionnement de Junta. (le conseil de « buen gobierno » des Zapatistes. Nous passons la fin de la soirée dans un café tenu par les élèves de l'école du Caracole.

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Le lendemain, après une baignade à sept heures du matin pour quelques uns, direction la communauté de Nueva Esperanza. Nous entrons au cœur de l'immersion par le dialogue avec les dirigeants de la coopérative SSIT LEQIL LUM (fruits de la bonne terre) qui développe l'accès à une auto-certification pour l'exportation de leur café. Et pour entrer dans le concret du sujet, nos hôtes nous font visiter une parcelle de caféiers, ce qui nous a permis de mieux comprendre leur projet. Les pièces du puzzle commencent à s'assembler. Il ne manquait plus que la visite de la pépinière de café pour confirmer leur désir d'autonomie.

Nous vivons alors deux temps fort d' au revoir : un avec les responsables de la coopérative et l'autre avec les responsables de la communauté. Ensuite, nous nous séparons le cœur lourd pour 4h ½ de route vers San Cristobal.

Immersion avec FRAYBA:

Lundi 6 aout notre groupe FRAYBA part pour un long voyage en cas de 5 heures dans le Nord Chiapas jusqu’à la commune de Tila où vivent environ 20000 habitants. Nous y rencontrons une communauté indigène, les indiens CH’OL, qui se battent depuis de longues années pour conserver son territoire communautaire que l’on appelle l’EJIDO.

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La municipalité officielle accapare une partie de la surface accordée (130 ha)  par des gens venus d’autres parties du Mexique, sans l’accord de la communauté. Celle-ci avait fait un recours en 1977 et malgré un procès gagné en 2008, n’a pas encore obtenu le retour de ses terres. Après discussions et échanges lundi, nous avons exploré avec eux la selva (la jungle) et retrouvé une partie des limites de la parcelle contestée. Ils nous ont montré leurs cultures extensives de café, maïs, banane, plantes médicinales, et leurs montagnes sacrées. Ils ont apprécié notre venue et nos marques de solidarités.

De notre côté, nous avons beaucoup appris grâce à leur lutte non violents et leur persévérance pour la reconnaissance de leur culture. Ils ont été pour nous un exemple de dignité.

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Mercredi 8 aout, FRAYBA nous a expliqué son action pour la promotion et la défense des droits de l’homme, au Chiapas, en héritiers des Frères de Bartolomé de las Casas, premier à prendre la défense des indiens au 16ème, et ancien évêque de San Cristobal de las Casas.

FRAYBA reçoit tous ceux qui veulent dénoncer les violations de leurs droits, leur apporte sa médiation auprès des pouvoirs publics et si nécessaire une aide juridique comme dans le cas de l’EJIDO de Tila.

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FRAYBA forme aussi des promoteurs d’éducation populaire dans leurs communautés indigènes pour apprendre à dénoncer les violations de droit, collecter des informations sur tous ces problèmes de violations de droit et de répression au Chiapas et alerter d’autres ONG nationales ou internationales pour les cas graves.

GROUPE FRAYBA