Aujourd’hui, on constate de plus en plus de discours aux relents sécuritaires et répressifs reliant les migrations à la délinquance, voire au terrorisme. De plus en plus de moyens financiers sont mis à disposition de la « sécurisation » et de la fermeture des frontières. De plus en plus de morts… L’échec des politiques migratoires actuelles est patent.

Problèmes

Une défaillance de la solidarité à l’égard des migrants

Aujourd’hui, l’Europe est une destination dangereuse pour les réfugiés : depuis 2014, près de 16 000 personnes ont disparu en Méditerranée et 30 000 sont mortes en 8 ans Méditerranée en tentant de rejoindre l’Europe. Le voyage coûte cher et l’argent des réfugiés finance les passeurs et les trafiquants qui auraient engrangé plus de 15 milliards d’euros depuis 2000. Dans les pays d’arrivée des migrants (Grèce, Italie), les gouvernements sont dépassés par les évènements.

En France, la situation des migrants pose problème et ces difficultés se posent à toutes les étapes du passage des migrants. A leur arrivée, les mineurs sont encore largement soumis aux tests osseux pour déterminer leur majorité, alors que le procédé est très imprécis. Le manque d’accompagnement des Centres d’Accueil et d’Orientation et la pénurie de traducteurs dans les Centres d’Accueil et d’Orientation sont d’autres freins au bon traitement des demandes d’asile.

En cas d’acception, leur insertion est particulièrement difficile. Alors que les dispositifs d’insertion sont saturés et que les migrants sont victimes de violences, l’intégration des demandeurs d'asile est ralentie par le fait qu’ils ne peuvent ni travailler sur le territoire français pendant un délai d'un an (bien que ce délai ait été raccourci par le rapport Taché), ni se former. Rappelons également qu’en cas de refus du droit de séjour, les enfants sont placés dans des centres de rétention administrative, avec leurs parents.

Finalement, les Accords du Touquet, qui font de la France le bras policier du Royaume-Uni, sont l’exemple le plus frappant de la faillite morale de la politique migratoire française. En empêchant les réfugiés de déposer une demande d’asile de l’autre côté de la Manche, en leur interdisant de quitter la France, la France porte atteinte « à la substance même du droit d’asile ».



Une politique migratoire inadaptée, inefficace et inhumaine

La politique d’externalisation des frontières de l’Union Européenne, destinée à dissuader les personnes de venir afin qu’elles restent dans les pays non membres de l’Union Européenne (Maroc, Libye, Tunisie, Turquie, Ukraine) est à remettre en cause. Par exemple, l’accord signé avec l’Afghanistan établit le retour forcé des Afghans déboutés du droit d’asile en échange d’une aide financière : Kaboul est considérée comme un lieu sûr.

Autre initiative très discutable : le traité passé entre l’UE et la Turquie en mars 2016. En échange d’un soutien financier, la Turquie s’est engagée sur un renforcement des contrôles aux frontières. Mais ce traité crée un précédent dangereux et risque de mettre fin au droit d’asile inscrit dans la Convention de Genève. En effet, deux éléments du traité facilitent le renvoi des migrants dans l’UE vers la Turquie :

  • - la Clause de réadmission : les migrants qui auront atteint l’UE via la Turquie mais qui n’obtiennent pas l’asile politique sont renvoyés en Turquie ;
  • - le Principe du « un pour un » : pour un Syrien renvoyé en Turquie, un Syrien resté dans les camps de réfugiés à la frontière avec la Syrie aura le droit d’être envoyé directement en Europe via un corridor humanitaire.

Or la Turquie n’applique que très partiellement cette convention, et ne protège pas les réfugiés. ; Ppar ailleurs, et contrairement au principe du « un pour un », très peu de Syriens ont été installés en Europe depuis l’accord. En conséquence de cet accord, le gouvernement grec a adopté une politique de rétention, laissant les demandeurs d’asile confinés sur ses îles pour un traitement accéléré et un renvoi rapide vers la Turquie.

L’autre modèle à reconsidérer dans la politique européenne à l’égard des migrants est le règlement de Dublin qui sépare des familles et casse des trajectoires de vie. Ce règlement européen émet le principe selon lequel « c’est le pays dans lequel a été formulée la demande d'asile qui est chargé de son instruction et de la décision finale. » même si l’article 17 stipule que tout Etat peut examiner lui-même une demande d’asile. Tous les pays ne sont pas les plus recommandables pour accueillir les demandeurs d’asile (Hongrie).



Solutions

Lors des élections présidentielles et législatives de 2017, 2 des 8 propositions portées par le CCFD-Terre Solidaire étaient consacrées à la protection des migrants : les propositions 11 et la 12 « Exigence de solidarité à l’égard des migrants et construction d’une politique migratoire alternative » :



Exigence de solidarité vis-à-vis des migrants

  • - Instauration d’un visa humanitaire européen dans le code communautaire des visas, et création de couloirs humanitaires : les réfugiés pourraient venir en avion, et ne pas arriver ruinés en Europe. Cette mesure permettrait une meilleure adéquation entre les pays où les réfugiés souhaitent se rendre, et les pays qui souhaitent les accueillir.
  • - Réouverture de la discussion européenne sur le Règlement Dublin.
  • - Abrogation des Accords du Touquet, signés en 2003, ainsi que des accords qui s’en sont suivis en 2009, 2010 : chaque personne doit pouvoir effectuer sa demande d’asile là où elle le souhaite.
  • - Vigilance concernant les protections sociales des étrangers en situation précaire, et respect de leurs droits. Il faut revoir les conditions d’accueil des demandeurs d’asile, et rétablir un droit à la formation et au travail.


Construction d’une politique migratoire alternative

  • - Révision des accords de « gestion concertée des flux migratoires » : l’accord de gestion concertée des flux migratoires signé entre l’UE et la Turquie doit être suspendu pour une meilleure organisation de la mobilité des personnes et un plus grand respect de leurs droits fondamentaux.
  • - Révision des accords bilatéraux destinés à former un cordon sanitaire autour de l’UE. Ces accords posent la question de l’instrumentalisation de l’aide au développement à des fins sécuritaires et mettent notamment en danger le principe de non-refoulement, et le droit du demandeur d’asile à une étude personnalisée de sa demande.
  • - Ratification de la convention des Nations Unies pour la protection des droits des travailleurs migrants et leurs familles.

Actions

Déterminé à lutter pour la dignité des migrants, le CCFD-Terre Solidaire agit de manière collective avec ses alliés, notamment à travers les Etats Généraux des Migrations.

Les Etats Généraux des Migrations (EGM)

Depuis cette démarche de plaidoyer concernant la protection des migrants au moment des élections présidentielles et législatives de 2017, le CCFD-Terre Solidaire s’est inscrit dans des démarches collectives, notamment à travers les EGM. La dynamique nationale des EGM a été lancée le 21 novembre 2017. Constitués de centaines d’acteurs locaux et nationaux - associatifs ou collectifs - impliqués sur les questions de migrations, les EGM demandent un changement radical de la politique migratoire française et européenne et la mise en place d’une véritable concertation de la société civile. L’idée est de faire une concertation citoyenne décentralisée sur l’état des migrations en France, qui se décline régionalement et localement dans des assemblées locales. Une convergence nationale des réflexions et propositions a eu lieu lors de la première assemblée plénière des EGM les 26 et 27 mai. N’hésitez pas à consulter La Place pour plus d’informations sur le fonctionnement des EGM : cliquez ici.

Les actions du CCFD-Terre Solidaire en PACALC Au-delà des Etats Généraux des Migrations, d’autres actions ont été lancées ou sont programmées dans notre région. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter l’article qui leur a été consacré dans notre Lettre d’Information Régionale. Cliquez ici.