Le Cil Vert, pour le CCFD-Terre Solidaire.
Alors que le G20 s’apprête à annoncer des mesures contre l’évasion fiscale et que l’Union européenne est ébranlée par le scandale du « Luxleaks », la Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires publie une étude sur les premiers chiffres rendus publics par les banques françaises grâce à la loi bancaire de 2013.
Une analyse des chiffres publiés début novembre 2014 par les banques françaises sur l'évasion fiscale révèle « les 7 péchés paradisiaques » que ces premières informations permettent d’établir. L’analyse confirme la nécessité d’étendre une obligation similaire de « reporting » à l’ensemble des entreprises.
Une récente interview de Lucie Watrinet, chargée de plaidoyer financement du développement au CCFD-Terre Solidaire, complète ce tableau.
Malgré ces données encore partielles (les bénéfices et les impôts versés seront publiés à partir de 2015) et ne reposant que sur une seule année, 7 enseignements clés peuvent déjà être tirés :
1. Un tiers des filiales étrangères des 5 plus grandes banques françaises se trouvent dans des paradis fiscaux si on se base sur la liste établie par Tax Justice Network.
2. 26% du chiffre d’affaires international des grandes banques françaises est réalisé dans les paradis fiscaux si on se base sur la liste établie par Tax Justice Network (15% si on se base sur la liste des paradis fiscaux de la Cour des Comptes américaine).
3. Dans les paradis fiscaux, les filiales sont essentiellement spécialisées en solutions de placement, financement structuré ou gestion d’actifs. L’activité de détail est très minoritaire (2 fois moins qu’ailleurs pour la BNP-Paribas, 3 fois moins pour le Crédit Agricole)
Exposition "Aidons l'argent" du CCFD, 2011 - Illustration clairerobert.org
4. En termes de chiffre d’affaires réalisé, les salariés des banques situés dans les paradis fiscaux sont au minimum 2 fois plus productifs que les salariés situés dans les autres territoires (plus de 3 fois pour la Société Générale et 13 fois pour le salarié irlandais de la BPCE).
5. Le Luxembourg est le paradis fiscal préféré des banques françaises, on y décompte 117 de leurs filiales. Elles y enregistrent en effet près du quart du chiffre d’affaires qu’elles réalisent dans les paradis fiscaux (viennent ensuite la Belgique, Hong Kong et la Suisse)
6. Les Iles Caïmans constituent le trou noir des activités bancaires : des chiffres d’affaires très disparates (parfois négatifs), une quinzaine de filiales pour les grandes banques françaises, mais aucune n’y a d’employés, au motif qu’ils sont localisés dans d’autres pays, ou que les activités réalisées sont imposées dans d’autres territoires. Ne serait-ce pas un aveu d’activité offshore ?
7. Les paradis fiscaux sont plus attractifs que les pays émergents : les banques françaises réalisent 3 fois moins de chiffre d’affaires dans les BRICS que dans les paradis fiscaux.
Ce travail s'est rendu possible par une coordination d'acteurs de la société civile au niveau national (ONG, syndicats, associations, ...) doublé d'actions de plaidoyer par des citoyens, à tous les niveaux de gouvernance : plaidoyer local, régional, parlementaire, ...