IMG_0445.JPG

Lieu mythique, et attendu par certains d’entre nous, l’école « Florestan Fernandes », école internationale des cadres du Mouvement des Sans Terres.

Rappelons d’abord que la formation est un pilier central du Mouvement des Sans Terre. Il ne s’agit pas seulement de mettre des hommes et des femmes en capacité de production agricole et de gestion de leurs petites exploitations, il s’agit aussi, et avant tout, de former les uns et les autres à l’analyse politique et l’action collective, de « produire » des leaders pour le mouvement, et la lutte qui est en route.

 

Cette école a ouvert ses portes en 1995, et a été construite sur la base du bénévolat. Ce sont les militants du MST, venus des acampamentos et des assentamentos, qui ont édifié l’ensemble de l’ouvrage avec leur bras, en commençant par la production même des parpaings. Et attention, ça ne ressemble pas à une série de cabanes… c’est un site de belle architecture comprenant un amphithéâtre de 150 places, des salles de cours, une bibliothèque, une salle multimédia, cinq bâtiments d’hébergement pouvant accueillir environ 200 personnes, un grand réfectoire, un site de production maraîchère, et une crèche, pour permettre l’égalité d’accès aux études pour les femmes et mamans.

Le financement a été assuré principalement par l’investissement de trois artistes qui ont créé des œuvres et abandonné leurs droits au profit de ce projet :  Chico Buarque, chanteur contemporain (le Brel ou le Brassens brésilien), Sangado, photographe, et un peintre dont le nom nous aura échappé.

 

Le lieu assure autant la formation initiale que continue des sans terres, mais aussi de militants issus d’autres organisations et mouvements sociaux, du monde entier. Les matières enseignées sont diverses : techniques agricoles, agronomie, écologie, sociologie, psychologie, philosophie, histoire, géographie, analyse politique… L’étudiant est au cœur du projet éducatif, on ne l’appelle d’ailleurs pas étudiant, mais « éduquant ». Nous sommes au cœur de l’éducation populaire, chacun vient avec ses savoirs, ses expériences, ses connaissances, ses questions… à partager. La logique est celle de la formation-action, de l’analyse de pratique pour retourner à la pratique. Chacun doit également s’impliquer dans la bonne gestion du lieu, en donnant 1h30 de son temps chaque jour, au jardin, au service, au ménage, à la bibliothèque…

 

Quelques chiffres : depuis 2005, 16000 étudiants, 12000 visiteurs, 500 professeurs bénévoles, 38 universités impliquées, une quarantaine de partenariats institutionnels.

 

Lendemain matin, juste avant le départ, nous assistons à une Mistica. On pourrait traduire par « temps de recueillement », certains diront peut-être d’embrigadement. Comme tous les matins, l’ensemble des étudiants et personnels de l’école Florestan Fernandes se retrouvent sur l’esplanade du lieu.

Une guitare et un Jembé invitent au rassemblement, et installent une première ambiance.

Commence alors un temps qui semble plus officiel, assez protocolaire : lecture d’un poème, musique, chant, et… levée des drapeaux du MST et de la Via Campesina, accompagnée par « l’internationale », chantée par tous, bras gauche levé.

Une séquence un peu hallucinante pour nous, mais tellement pleine de convictions, de volonté, d’espérance. Je crois qu’on a à peu près tous eu froid dans le dos, les poils tout debout sur les avant-bras, la larme presque à l’œil.