Près de trois cents ateliers, séminaires, assemblées, et une forte cohésion d'ensemble : les deux journées du Climat forum, l'un des trois pôles du Sommet citoyen pour le climat tenu à Montreuil samedi 5 et dimanche 6 décembre (1), ont dessiné d'encourageants contours pour le mouvement citoyen sur les questions climatiques, en cours d'émergence en France, en Europe et dans le monde.



Sur le constat, tout d'abord : l'heure n'est plus aux redressements, mais à la rupture radicale avec le modèle économique actuel. Sur l'action ensuite : des solutions concrètes existent, adoptons-les sans attendre que les gouvernements bougent. Sur les alliances enfin : des traditions de luttes très diverses se coalisent, qui identifient les dérèglements climatiques comme facteurs majeurs de déstabilisation.



Les trois ateliers qu'organisaient le CCFD-Terre solidaire y ont fait écho :

L'atelier « Organisons-nous pour la transformation », en particulier, a fait salle pleine pour échanger sur les nouvelles formes de mobilisation suscitées par les dérèglements climatiques. « Dans un contexte mondial qui a vu naître de nouveaux mouvements sociaux, comme les Indignés, la question du climat a rapproché des environnementalistes et les luttes pour la justice climatique », souligne Moema Miranda (Ibase, Brésil).



Plus récemment, une approche féministe a émergé dans les pays du Sud où les femmes sont à la fois les premières touchées par les dérèglements climatiques et porteuses de solutions pertinentes, du fait de leur rôle dans l'alimentation, les soins etc. —, et ça change tout ! , appuie Samantha Hargreaves (Womin, Afrique du Sud). En Inde, où le « développement » du pays creuse un fossé grandissant entre nantis et démunis, Lourthusamy Arokiasamy (Areds) constate aussi que les dahlits (« intouchables »), les plus pauvres,sont conduits à défier radicalement « la dictature des grandes firmes ».

Partout les plus fragiles sont les plus touchés par la crise écologique. Diana Lopez, du syndicat rural Southwest workers' union (SWU), à la frontière Mexique-État-Unis, le constate aussi. « Il existe un racisme environnemental, les gens de couleur, par la pauvreté et la discrimination, sont les plus exposés à la pollution, vivent dans les zones à risque d'inondation, etc. »

Au Guatemala, dont la population indigène, majoritaire, est réprimée depuis des décennies, la lutte pour la récupération des terres ancestrales que mène le Comité paysan de l'Altiplano se double de formations aux pratiques agro-écologiques . « Nous avons noué des alliances avec des organisations comme la Via Campesina, souligne Neydi Lopez, et nous avons décidé d'emprunter la voie politique en élisant l'un des nôtres au Congrès ».

Dans la salle, les Français tendent l'oreille aux propos d'Eros Sana, militant du mouvement climatique « 350.org ». « Dans nos quartiers, la conviction qu'il faut changer le système en arrive au point où les luttes climatiques sont rejointes par des groupes de l'afroféminisme, de la lutte contre le racisme ou la discrimination sexuelle. C'est une ébauche de cette écologie populaire que nous cherchons à cristalliser depuis plus de dix ans. ! »

Patrick Piro