Le 19 mars 2015, la soirée sur "les routes des migrations au Sahara et au Sahel" a réuni de nombreuses personnes du secteur de Privas et jusqu'à 30 km alentour. Ce témoignage faisait suite au Forum Social Mondial des Migrations  de Johannesburg en Afrique du Sud en décembre 2014. Comme Renée de Saint-Priest, l'intervenant Assane Bâ, responsable du Réseau des migrations au CCFD-Terre solidaire à Paris, y avait participé. Lui-même enfant de l'inter culturalité comme il se définit, né à Dakar, français et sénégalais, il assume sa double nationalité et exprime la grande richesse venant d'un multiculturalisme vécu. Il va rencontrer les migrants sur leurs routes aussi bien au Sahel qu'au Sahara, discute avec eux sur leurs espoirs, leurs difficultés et leur détresse… leur avenir.

Le Sahel est une immense région s'étendant dans une zone semi désertique sur plusieurs pays : Mali, Niger, Mauritanie, et nord Sénégal. Les populations, sans grande ressource, n'arrivent pas à donner un quelconque espoir d'avenir à leurs enfants ; la malgouvernance, les guerres sont aussi les principaux motifs de départ. C'est pourquoi de plus en plus jeunes (15-17ans), ils veulent rejoindre d'autres horizons. Pour eux, ce sera toujours meilleur, même si c'est la mort qui les attend en chemin.

Avant l'intervention de l'OTAN en Libye, les migrants du Tchad, du Niger allaient travailler en Libye. Actuellement, ce n'est plus une destination : A la frontière avec la Libye, des milices les récupèrent pour les vendre à des milices libyennes qui les revendent pour les embarquer, s'ils ne les torturent pas, sur des bateaux-poubelles à destination hypothétique de l'Italie.

De même, le contexte géopolitique a rendu impossible les destinations les plus prisées comme l'Afrique du Sud, le Gabon, la Côte d'Ivoire. Les routes se sont inversées et l'Europe reste le seul espoir d'opportunités, même si les difficultés se sont renforcées. Malgré toutes les explications sur un avenir plus qu'incertain en Europe, rien ne peut empêcher les jeunes de passer au péril de leur vie.

 

De son côté, l'Europe s'est dotée d'une agence de surveillance FRONTEX destinée à empêcher les migrants d'arriver sur ses côtes. De plus, des négociations sont passées avec les pays "tampons", tels que le Maghreb, pour qu'ils augmentent leur surveillance et bloquent les migrants à l'intérieur de leur propre territoire en échange de subventions. Certains volontaires à la migration essaient de passer de nombreuses fois, espérant chaque fois réussir ; car, comment rentrer les poches vides et revoir tous ceux qui se sont cotisés pour payer la traversée dans l'espoir qu'un jour cet exilé ferait vivre son village.

Les Caritas et le CCFD Terre solidaire ont développé 4 types d'actions pour venir en aide à ces populations :

- une assistance sur les voies de passage avec mise en réseau pour partager les informations sur ces routes

- une sensibilisation sur les difficultés du voyage et les risques possibles afin de réfléchir à une alternative avant le départ

- le plaidoyer auprès des gouvernements des pays de migrations pour développer une coopération économique permettant de créer des possibilités d'insertion locale

- un développement de projets de coopération économique avec la société civile et des associations sur place.

Tout ceci est un travail de longue haleine qui a été très déstabilisé par le contexte géopolitique de cette partie du monde : interventions en Libye, djihadistes au Mali, Boko Aram, conflits au Nigéria…

Des expériences de réinsertion ont réussi, leur objectif est de remettre debout des hommes et des femmes ayant perdu tout espoir. Au Sud du Sénégal, par exemple, à M'Bour, un processus de restructuration des personnes puis de réinsertion a été entamé pour et par les "refoulés" de la migration avec l'appui d'une association locale soutenue par le CCFD Terre solidaire. Le financement de pirogues équipées pour la pêche a permis à un groupe solidaire de jeunes de se réinsérer économiquement et de montrer le chemin pour un redémarrage réussi dans la vie.

Pour ceux que nous rencontrons, notre accueil devrait être à la mesure des difficultés qu'ils ont surmontées. N'oublions jamais que tout migrant est d'abord une personne humaine et que tout pays s'est construit grâce aux migrations.