Le CCFD-Terre Solidaire en est convaincu depuis longtemps par les nombreux témoignages de ses partenaires des Pays du Sud : le modèle agricole est l'une des causes majeures de la faim, il doit être changé. En cause : les accaparements de terre par l'agrobusiness pour la production sur d'immenses exploitations de monocultures d'exportation (soja notamment). Les expulsions, mais aussi les fumigations, font des dégâts considérables. Le CCFD soutient ces paysans dans leur lutte contre les accaparements et les pesticides. Quand le foncier est sécurisé, alors les paysans sont formés à l'agroécologie. Ils sont des dizaines de milliers à pouvoir témoigner de l'amélioration de leurs conditions de vie par l'agroécologie : ils ne souffrent plus de la faim, et ont une production excédentaire et de qualité dont la vente va aux dépenses de santé et d'éducation des enfants.

S'agissant d'un système agricole et alimentaire mondialisé, notre agriculture est aussi remise en cause. L'agroécologie, et particulièrement l'agriculture biologique, permet de sortir de l'impasse de l'agriculture conventionnelle. Celle-ci en effet, par une course à la productivité, cumule les dégâts humains et environnementaux : forte baisse du nombre de producteurs et rémunération insuffisante, baisse de la biodiversité, fortes émissions de gaz à effet de serre, dégradation des sols, pollution de l'eau, perte de qualité des aliments (des consommateurs de plus en plus nombreux refusent les pesticides de synthèse). Sur tous ces points noirs, l' agroécologie apporte des améliorations ; petites améliorations s'il s'agit d'une agroécologie se contentant de quelques pratiques telles le non labour, la couverture des sols, ou une légère réduction des intrants ; fortes améliorations pour la permaculture, ou l'agriculture bio sans pesticides de synthèse et engrais « chimiques », mais : engrais organiques, desherbage mécanique, choix des semences, lutte biologique ou emploi de molécules simples, associations végétales, légumineuses...Et élevages fermiers ou herbagers. De plus ce sont des modes de production résilients /changement climatique.

Par nos choix de consommation nous pouvons contribuer à la conversion de l'agriculture.

Quelles sont les deux plus graves menaces pour l'humanité en terme d'atteinte à l'environnement ? le dérèglement climatique et la perte de biodiversité. Le modèle agricole mondialisé dominant, ou plus exactement le système alimentaire et agricole pris dans sa globalité, en est le premier contributeur. Ainsi il émet plus du tiers des gaz à effet de serre (GES) mondiaux, principalement par la déforestation, l'élevage et les engrais azotés. Premier aussi en France, avec 31,4% des émissions nationales (agriculture 19,4 % + Industries agroalimentaires 12%), devant les transports (30,8 %) : Concernant la biodiversité, la déforestation est l'un des principaux responsables, ainsi que les pesticides pour les insectes. Pour ces raisons, en plus des dégats considérables qu'il cause aux petits paysans des pays du Sud, (voir article précédent) le système alimentaire et agricole doit être changé.

La modification de nos comportements alimentaires favorise ce changement de système et la conversion à l'agroécologie. Les distributeurs sont sensibles à l'évolution de la demande et la font remonter à leurs fournisseurs et in fine aux producteurs. Deux exemples peuvent nous en convaincre : la mention valorisante « garantie sans huile de palme », et le développement de l'agriculture biologique boostée par la demande (+ 13% par an). Il nous faut donc envoyer des signaux négatifs pour les productions néfastes pour l'environnement.

En premier lieu, pour la biodiversité, celles responsables de la déforestation, huile de palme, mais surtout soja importé d'Amérique du Sud, pour nos élevages industriels soit 96% des porcs, 81% des poulets de chair et 76% œufs, 60% des vaches laitières et 38% des bovins viande. Concernant les pesticides de synthèse seule l'agriculture biologique garantit leur non utilisation.

Voyons maintenant le problème du réchauffement climatique. La déforestation encore : éviter les productions d'élevages industriels : viande, mais aussi lait et œufs. Compenser par des légumineuses (haricots, lentilles, pois chiches, pois cassés...) Les engrais azotés ; là aussi non emploi en agriculture bio. L'élevage : c'est surtout les ruminants qui sont visés pour leurs émissions de méthane. L'immense majorité des publications conseille donc de manger moins de viande, surtout de bœuf et d'agneau . C'est sans compter sur l'effet positif de la séquestration du carbone dans les sols enherbés qui compense l'effet négatif des émissions de méthane. (selon une étude de l'Institut de l'Elevage français). Les productions d'herbivores disposant d'une surface en herbe suffisante sont écologiquement plus vertueuses que celles des élevages industriels.

En sus les émissions de GES (EGES) de l'agriculture (env. 25% des EGES mondiales), il convient de considérer les EGES en aval,qui en représentent environ la moitié, car c'est l'ensemble du système alimentaire et agricole qui est en cause. Par ordre d'importance : transformation et emballage, transport, chaine du froid et vente au détail, déchets. Ce qui veut dire pour nos achats : produits en vrac, de saison, locaux ; et diminuer ses déchets.

Jean-Marie Patoureaux

Article publié dans la lettre mensuelle du MCC National