“Le commerce nous offre un choix. Mais un milliard d’humains souffrent de la faim. S’ils avaient vraiment le choix, ils choisiraient de manger.” Une phrase forte du film de Mathieu Roy, “Les Dépossédés”, projeté à la Maison des Associations dans le cadre du festival AlimenTerre samedi 30 novembre.

Durant plus d’une heure, ce film examine la vie de paysans de pays aussi divers que l’I nde, la Suisse, le Congo ou le Canada, et chronique au jour le jour l’impact du système alimentaire mondial contrôlé par un nombre de plus en plus restreint de multinationales. Ponctuées de commentaires de membres de l’Organisme Mondial du Commerce, de paysans et d’analystes, les images fortes nous font vivre un quotidien de plus en plus difficile depuis 50 ans, un quotidien où ceux qui produisent notre nourriture sont souvent les moins bien nourris à cause d’un système qui ne répond souvent plus aux nouveaux défis environnementaux et humains.

Le film a ouvert la voie à un débat animé où des représentants du monde agricole de la région de Nice ont échangé avec des représentants de la distribution citoyenne et d’organismes de soutien financier et d’influence. Ouvrant la discussion, Raphaëlle Noviano, agricultrice bio de Villars-sur-Var après une reconversion il y a 4 ans, et Pierre Magnani, maraîcher installé sur les coteaux de Nice depuis plusieurs générations et bio depuis 1996, ont tous deux parlé avec passion de leur approche pour recréer un lien personnel et communautaire avec la terre, et comment ils essayent d’impliquer les consommateurs et les élus. Jonglant entre la production, la distribution et les impératifs saisonniers et administratifs, ils racontent comment il est possible d’allier ses passions pour créer des emplois et apporter des biens et des services utiles à tous. Impliquant les communautés lors de visites allant de l’éducation aux découvertes gustatives et olfactives, Pierre Magnani montre par exemple aux élus comment son activité peut bénéficier au tourisme et à l’économie locale.

Mais la pression foncière de notre région est aiguë. Liliane Strebler de Terre de Liens explique comment le mouvement travaille avec des agriculteurs tels que Raphaëlle et Pierre pour pérenniser les terres agricoles afin d’aider à endiguer le décroît des petites entreprises agricoles, un nombre qui a été divisé par dix en 30 ans dans les Alpes-Maritimes. Par le rachat de terres, l’implication des collectivités locales, des décideurs publiques et les campagnes de sensibilisation, le mouvement aide les agriculteurs à trouver des terres et s’y installer. Mais toute production, aussi vertueuse soit-elle, ne peut réussir que si les consommateurs sont à l’écoute et si un réseau de distribution est mis en place. Représentant Nice Coop, une initiative citoyenne qui a pour but de soutenir le changement de notre modèle de consommation, Peggy Baudrand explique comment l’initiative aide à créer un mouvement à l’échelle de quartiers de la ville de Nice. Un mouvement qui commence en chacun de nous, par nos choix individuels de consommation et de santé.

Jeanne-Maureen Jorand, chargée du plaidoyer souveraineté alimentaire au CCFD-Terre Solidaire (association organisatrice du Festival à Nice) a rappelé que, même si les actions locales sont primordiales, tout changement doit aussi prendre en compte les impératifs globaux et impliquer les populations et les élus aux niveaux régional, national et international, car le problème est global et systémique.

Les questions des plus de 60 participants au Festival ont fusé durant les plus de 45 minutes imparties, avant qu’il ne se termine tard dans la soirée avec des échanges continuant hors de la salle. Échanges qui devraient continuer lors de la nouvelle incarnation d’AlimenTerre en 2020 avec de nouveaux films, nouveaux défis et de nouvelles solutions pour changer le cycle du système alimentaire.