Les solutions, proposées ou imposées, par la firme Monsanto pour les semences et les intrants ont décidément tout faux ! En témoigne le travail effectué sur deux ans au Burkina Faso par la Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain, la COPAGEN, partenaire du C.C.F.D.-Terre Solidaire. Entre 2014 et 2016, la COPAGEN a mesuré, sur le terrain, les performances réelles du coton Bt, une variété de coton transgénique introduite en toute illégalité dans le pays en 2013, puisqu’il n’existait pas de loi de biosécurité pour l’encadrer, comme l’exige le Protocole de Carthagène dont le Burkina Faso est signataire. Cette introduction du coton O.G.M. s’est faite avec la complicité active des autorités, des chercheurs et des grandes sociétés cotonnières, comme la principale : la Sofitex. Et les conclusions du rapport de la COPAGEN sont consternantes ! Jean-Paul Sikeli, secrétaire exécutif de la COPAGEN y déclare : « Nous n’avions que cette voie. Impossible en effet d’obtenir des chiffres officiels… Nous nous sommes substitués aux pouvoirs publics défaillants ».

Les promoteurs de l’introduction du coton transgénique ont imposé aux paysans la culture du Bt jusque sur les deux tiers des surfaces cotonnières, sur la base d’allégations mirobolantes de laboratoire. Pourtant la grogne des petits producteurs est rapidement montée. La Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain –la COPAGEN- et ses partenaires burkinabè ont sollicité alors 203 petits cultivateurs qui leur ont transmis, pendant des mois, les données de leurs activités. Le résultat est sans appel. En passant du coton conventionnel au Bt, non seulement les coûts de production n’ont pas diminué, mais au contraire ils ont augmenté de plus 7 % à l’hectare et de de plus de 32 % à la tonne produite. Les rendements ont-ils été supérieurs « de 30 à 35 % en moyenne » comme promis par la firme ? Bien au contraire, ils sont de 7 % inférieurs. Il leur était également promis que leurs revenus paysans bondiraient « de 64 % », ce qui s’est avéré archi-faux, puisqu’ils ont chuté de 14 % ! Le seul point positif de ce qui leur était allégué concerne la pénibilité du travail, en diminution, car le nombre de traitements chimiques, sur cette variété génétiquement modifiée pour produire son propre insecticide, est divisé par trois. Sauf que des chenilles résistantes commencent à se développer, réduisant ce maigre avantage du coton Bt !

C’est cette constatation qui a poussé Thérèse Kondombo, enquêtrice de terrain, à alerter la Sofitex. Dont la première préoccupation fut de contacter la COPAGEN pour s’offusquer de cette étude menée sans son autorisation. Ousséni Ouédraogo, cheville ouvrière de l’enquête s’en étonne en ces termes : « C’est à peine croyable ! Les paysans sont propriétaires de leurs champs et libres de leurs activités ; de quel droit nous imposer d’en référer à une autorité pour mener ce travail ? » Il faut savoir que la Sofitex est une entreprise d’Etat dont le directeur, nommé par le président, au sein des membres du parti dominant, était réputé plus puissant qu’un ministre sous le régime de Blaise Compaoré. L’entreprise a donc exigé l’interruption de l’enquête et la récupération de toutes les données. Des paysans ont même été inquiétés. Thérèse Kodombo, elle-même a interrompu ses visites de terrain. Mais la COPAGEM a tenu bon. Et entre temps, en octobre 2014, le régime est tombé et l’étude en cours a été menée jusqu’à son terme. La COPAGEM est prête désormais à en divulguer le contenu. Cette situation montre bien, s’il en était besoin, quelques états de fait concernant une firme comme Monsanto dans les pays en développement : un, son emprise sur les semences, intrants et traitements chimiques ; deux, sa collusion avec les pouvoirs en place ; trois, son opposition totale à l’agro-écologie ; mais aussi la résistance constructive des associations locales, alliée au travail des communautés de petits agriculteurs. Ce type de développement mérite bien qu’on le soutienne !