Le gouvernement colombien et les rebelles des FARC, les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie, sont parvenus à un accord de paix, après 52 ans de conflit armé. Il a été annoncé mercredi 24 août à La Havane, puisque les négociations se tenaient à Cuba depuis 44 mois, en 2012, un an après la mort d’un des leaders du mouvement paysan d’inspiration marxiste, Alfonso Cano. Certes, la conclusion des pourparlers ne vaut pas encore accord de paix définitif, mais, comme l’a dit Humberto de la Calle, le chef négociateur du gouvernement : « la guerre est finie ! ». Pour entrer en vigueur, le texte doit être signé par le président colombien, Juan Manuel Santos, et par le chef des FARC, Rodrigo Londono, alias Timochenko, à Bogota, la capitale. Enfin, et surtout, il doit être ratifié par les électeurs le 2 octobre, jour du plébiscite promis par le président Santos. Et, d’ici là, les FARC tiendront en Colombie leur 10ème et dernière conférence nationale, afin de soumettre à leur base le résultat des négociations et voter leur transformation en parti politique.

Cet accord de paix mettra un terme à 52 ans de guerre civile. Le conflit armé laisse un lourd bilan : 220 000 morts et plus de 7 millions de déplacés, essentiellement des paysans et leurs familles chassés de leurs terres par les combats et par les milices paramilitaires d’extrême droite. Le conflit colombien a été un conflit surtout rural. Les FARC comprendraient aujourd’hui 7 à 8 000 combattants, dont près de 40% sont des femmes, et depuis sa création en 1964, la guérilla a accumulé un arsenal très important : des fusils, des grenades, voire des missiles, ainsi que des armes « passives » comme les mines anti-personnel, la Colombie étant le second pays le plus miné au monde, faisant près de 11 000 victimes. Ainsi, la complexité de la discussion tient notamment aux modalités d’application de l’abandon des armes. A la signature officielle de l’accord à la Havane, tous les guérilleros se cantonneront dans les 31 zones délimitées par les négociateurs. L’ONU participera à la supervision du cessez-le-feu. Les conditions de la réincorporation des guérilleros à la vie civile et la transformation des FARC en parti politique ont été précisées. Une fois démobilisés, les membres de l’organisation seront représentés de droit au Congrès : durant deux législatures, ils seront assurés d’obtenir cinq députés et cinq sénateurs, quel que soit le résultat obtenu dans les urnes.

Mais déjà des accords partiels portent sur des questions essentielles pour la vie économique, sociale et politique des régions concernées. Ils portent notamment sur le développement rural, puisque c’est le monde paysan qui a été le plus touché dans ce conflit interminable ; mais également cela porte sur la réparation des victimes, sur les mécanismes de la justice dans la période de la transition, ou encore sur les conditions du cessez-le-feu bilatéral et de la démobilisation des guérilleros.

Mais le conflit armé ne se résumait pas à l’affrontement entre les FARC et les forces armées. Si les dialogues de paix, d’une manière générale, ont permis de réduire la crise humanitaire issue de ce conflit, la période passée récente correspond aussi à une augmentation des actions ciblées contre des communautés et des organisations de défense des droits de l’homme, notamment par les paramilitaires. L’arrêt du cycle de la violence passe donc par le désarmement de tous les acteurs illégaux, et pas seulement des FARC, mais aussi des narcotrafiquants, des paramilitaires et de la guérilla de l’Armée de Libération Nationale (l’ALN). Cela semble d’autant plus important et urgent que les affrontements entre ces groupes s’intensifient pour conquérir les zones stratégiques pour le commerce illicite qui seraient « délaissées » par les FARC. On le voit, la route est ouverte, mais le chemin d’une vraie paix en Colombie est encore long, pour un développement juste des populations.