Alors que 805 millions de personnes souffrent aujourd’hui de la faim, les changements climatiques constituent un fardeau supplémentaire pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle des plus pauvres, et mettront à mal les efforts actuels déployés dans la lutte contre la faim. Pourtant, ces questions restent très peu discutées dans le cadre des négociations internationales sur les changements climatiques. Lutter contre les impacts des changements climatiques et lutter contre la faim relèvent du même effort, du même impératif et de la même urgence. Faire de l’agenda climat un agenda contre la faim, voilà l’opportunité extraordinaire que représentent ces négociations internationales. Il est encore temps pour les Etats du monde de créer ensemble « un climat contre la faim ». C’est pourquoi, sept Associations ou Organismes se sont unis pour proposer des recommandations, qu’ils ont intitulées : « Ensemble, créons un climat contre la Faim ». Il s’agit de : Acting for live, Action contre la Faim, Care France, le C.C.F.D.-Terre Solidaire, le Réseau Climat développement, le Secours Catholique-Caritas France et l’Unicef.
La question posée est d’abord : pourquoi les changements climatiques menacent-ils la sécurité alimentaire et nutritionnelle ? Parce qu’ils dégradent les terres, détruisent les récoltes, salinisent l’eau douce, réduisent les terres fertiles et les zones de pâturage, rendent plus fréquentes et plus intenses les inondations et les sécheresses. Ainsi les changements climatiques ont des conséquences dévastatrices sur la disponibilité et la qualité des ressources naturelles, et en premier lieu sur les ressources en eau, déjà aujourd’hui problématiques, destinées à la consommation et à l’agriculture. Responsable des trois quarts des catastrophes naturelles, le réchauffement climatique représente une menace pour 250 millions de personnes par an. Paradoxe intolérable, ceux qui contribuent le moins au réchauffement climatique sont ceux qui en souffrent le plus : les communautés fragiles vivant sur les littoraux, comme au Bengladesh, et les îles, comme aux Maldives ; mais aussi les petits agriculteurs, ainsi que les enfants et les femmes, qui sont des populations les plus démunies face aux conséquences des changements climatiques, du fait de leurs capacités de résilience souvent limitées, voire épuisées. Les femmes, parce que leurs moyens de subsistance dépendent des ressources naturelles qui se dégradent, comme l’eau, les surfaces agricoles, le bois de chauffage ou les poissons, ou dépendent de l’accès à la terre et à l’épargne ; les enfants, parce que la faim et la malnutrition les exposent aux maladies comme diarrhées, paludisme, pneumonie, et toutes infections qui conduisent aux retards physiologique ou cognitifs irréversibles, voire à la mort programmées.
Selon un rapport du Programme des Nations Unies pour le Développement (le PNUD), « 600 millions de personnes supplémentaires souffriront de la faim d’ici 2080 en raison des changements climatiques, si nous maintenons nos émissions mondiales de gaz à effet de serre au niveau actuel ». Hors, bon nombre de décisions internationales récentes encouragent, ou du moins entretiennent des solutions malheureuses au niveau des modèles agricoles, des exploitations des ressources en tous genres, comme les ressources fossiles, minérales, végétales, ainsi que les ressources financières et même humaines. Ces associations et organismes non gouvernementaux déjà citées affirment que « ce n’est pas le climat qu’il faut changer mais les modèles et les systèmes aujourd’hui en cours ». Nous aurons bientôt l’occasion de revenir sur leurs analyses et leurs propositions.