Il y a un an, on se présentait gaillardement nos « meilleurs vœux ». Le résultat fut décoiffant : violents incendies (en Australie, en Amazonie, en Californie, au Canada en particulier), explosion du port de Beyrouth le 4 août et une pandémie d’ampleur mondiale sur les bras. Entre autres. Les grincheux et les réalistes compléteront.

        Alors, doit-on encore se souhaiter quoi que ce soit ? Le souhait – étymologiquement « le désir exprimé par quelqu’un » – est-il bien raisonnable ? Le problème n’est pas neuf. Et cependant nous continuons à souhaiter (faire des vœux) et, parce que le souhait se fonde sur l’espérance, à espérer. En Bourgogne, c’est une question de verre à moitié vide ou à moitié plein. Ce qui est bien avec un verre (de vin de Bourgogne, naturellement !) à moitié vide, c’est que, après nous avoir été présenté a moitié plein, nous avons pu en profiter, et pas qu’à moitié ! Mais si le verre, après avoir été à moitié vide (et nous n’y sommes pas étranger…), peut à nouveau nous être présenté à moitié plein, on ne s’en plein plaindra pas !

        Bref, oui à l’Espérance ! Oui aux bons vœux !

        Il nous tarde tous de pouvoir renouer avec la vie sociale justement incarnée, corporelle, dont nous prive la pandémie. Les rencontres « en chair et en os » manquent. Les nouvelles technologies sont formidables, mais ne remplacent pas les rencontres dites « en présentiel ». Rien ne vaut les rencontres physiques. Nous avons hâte de recommencer à circuler normalement, de retrouver nos amis, de vivre des temps forts de prière collective lors de grands rassemblements. Que cela nous plaise ou non, nous avons besoin des autres. L’année 2020 nous l’a bien montré.

        Ou plutôt rappelé. Car ce constat, on le trouve dès les premières pages de la Bible. « Il n’est pas bon que l’homme soit seul », déclare Dieu après avoir créé Adam (Genèse 2,18). Quelques versets plus loin, Ève pointe le bout de son nez. Adam s’exclame : « Os de mes os et chair de ma chair ! » (Genèse 2,23). C’est le cas de le dire, puisque Ève est issue de l’une de ses côtes. Mais cette expression nous rappelle aussi que nous sommes des êtres corporels. Nous avons besoin de relations incarnées, c’est-à-dire « en chair », sans quoi nous perdons notre humanité.

        Cette dimension est d’ailleurs au cœur de Noël. Ce bébé si fragile, dans la crèche, c’est la Parole divine « devenue chair » (Jean 1,14). Elle aurait pu se manifester à nous sous la forme d’un héros ailé déchirant les cieux, mais elle choisit de devenir pleinement humaine. Noël nous invite ainsi à célébrer l’incarnation. Paradoxalement, beaucoup d’entre nous auront fêté Noël sans leurs proches cette année. Dans ces moments difficiles, nous réalisons davantage encore notre besoin de vivre une humanité incarnée, toute fragile qu’elle soit. Vivement les retrouvailles en chair et en os !

        Saint et Joyeux temps de la Nativité. Meilleurs vœux pour 2021, avec l’espoir de nous retrouver « en chair et en os » et en bonne santé…

Jean-Claude Chipiloff  aumonier de la délégation de Côte d'Or

Sources d'inspriration "Echos jésuites" et "Réforme"

 

la basilique St François à Assise