Table ronde régionale à Vitrolles et festival Festicités

Samedi 19 mars à 14h nous étions une trentaine de la région à nous rassembler dans l’église du Bon Pasteur à Vitrolles. Ce jour-là, en effet, nous accueillions notre partenaire Milica Koncar pour une table ronde « Gestion de l’eau, du territoire, de l’énergie : initiatives citoyennes, changement climatique et transition, un regard croisé international et local ». Cet évènement avait pu s’inscrire dans le cadre de Festicités, (Festival des initiatives et villes en transition de la métropole Aix-Marseille) :

Milica nous a présenté les actions que mène son association (CZZS - Centre pour l’Environnement) en Bosnie Herzégovine, actions qui s’organisent autour de trois programmes : la biodiversité et les zones protégées, les transports et l’énergie, en particulier le développement abusif des centrales hydroélectriques. S’ajoutent à cela d’autres activités autour de la gestion des déchets, des OGM, de la sécurité des activistes environnementaux… De riches échanges ont suivi avec trois structures de PACA : Maison Régionale de l'Eau (l'eau et les rivières), Marais du Vigueirat (préservation de la biodiversité) et Soleil de l'Arc (énergie).

Bien que les dimensions des pays ne soient pas comparables, nous avons relevé beaucoup de convergences entre les combats de CZZS pour faire avancer les questions environnementales et ceux qui ont lieux en France, spécialement en Provence.

Les questions de la salle ont montré que ce débat explorait de nombreux domaines : - Les interrogations liées à l’éducation à l’environnement à l’école et hors de l’école pour les enfants et les jeunes : démarches, outils nombreux mais peu connus. - Le rôle des politiques nationales ou territoriales qui prennent en compte ou pas la question environnementale : préservation des zones protégées, lutte contre la précarité énergétique, accessibilité des transports en commun, développement des énergies renouvelables … - Le souci de plusieurs personnes dans la salle, mais aussi parfois la difficulté, de conjuguer la lutte contre le changement climatique et la lutte pour la justice sociale « écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres » Laudato si’ (49). Un petit regret : ne pas avoir été plus nombreux à partager cette réflexion autour des diverses expériences exposées, ici et en Bosnie, qui visent toutes à promouvoir un modèle plus vivable pour notre monde.

Marie-Françoise Coppolani

« L’implication citoyenne dans la transition énergétique des territoires » Carême 2022 à Gap – Table ronde du 2 avril 2022

« Nous ne croyons pas que les changements vont s’opérer tout seul »

C’est en présence de Milica Kongar, partenaire bosniaque du CCFD-Terre solidaire et de Jérôme Lelong du pôle production d’Enercoop Paca, qu’Emmanuel Rauzier, de l’association NegaWatt, lance la table ronde organisée par le CCFD-Terre Solidaire des Hautes-Alpes, à laquelle une soixantaine de personne a répondu.

Mais qu’en est-il des points de convergence des trois intervenants en particulier du côté de la Bosnie Herzégovine ? Pour Milica, une des responsables de l’association environnementale CZZS située à Banja Luka, une des problématiques auquel le pays est confronté est la production de charbon qui fournit 70 % de l’électricité et dont 25 % sont exportés. Mais une des principales bagarres de CZZS est de remettre en cause la multiplication des projets hydroélectriques conduits par des investisseurs privés sans étude d’impact et sans concertation avec les usagers concernés et sans rapport avec les besoins réels des territoires.

Ce combat fait réagir Jérôme Lelong d’Enercoop qui rappelle que l’objectif principal de cette coopérative est précisément de remettre l’énergie dans les mains des citoyens afin de faire avancer la transition écologique sur les territoires. Enercoop, fournisseur d’électricité, fait en effet appel à des producteurs d’électricité indépendants par l’éolien, le photovoltaïque, l’hydraulique et la biomasse, en prônant par ailleurs la réduction des consommations d’énergie.

Milica réagit en précisant que CZZS veut développer l’énergie éolienne et photovoltaïque en Bosnie Herzégovine grâce notamment à un travail législatif qui a permis de lever l’interdiction d’installation de panneaux photovoltaïque dans le pays.

Emmanuel Rauzier rappelle que NégaWatt milite pour la sobriété énergétique et réaffirme que l’implication et la coopération des citoyens sont au cœur du combat de NégaWatt. La méthode est originale et très pédagogique. Elle repose sur « 6 R » : réduire, réutiliser, recycler, remplacer, réparer relocaliser et mutualiser. Tout un programme !

Telles sont les grandes lignes des interventions très documentées des trois protagonistes.

Le débat, conduit par Joël Descoings (CCFD-TS 05) a permis d’aborder la gestion des déchets, le recours aux OGM et aux produits phytosanitaires et les controverses sur les éoliennes ce qui a permis à Milica de conclure en affirmant que « nous avons besoins de sources d’énergies diversifiées et de proximités. CZZS n’est pas favorable aux grands projets qui échappent au contrôle local » toute la question de l’implication des citoyens dans la transition écologique… Retour à la case départ !

Merci à Milica, Emmanuel et Jérôme pour avoir permis au CCFD-Terre Solidaire de confirmer l’importance du partenariat ici et là-bas, sources de changement et de d’incarnation du thème de ce Carême 2022 « Nous habitons tous la même maison ».

Baratier 05 le 22 avril 2022

Joël Descoings et Jacques Pulh

Les actions du Centre pour l’Environnement

Ecrit par Milica Končar Traduit par Jeanne Loiret

La Bosnie-Herzégovine est un petit pays du Sud-est de l’Europe, situé sur la péninsule balkanique. Elle possède une population d’environ trois millions d’habitants et une surface de 51 130 km2. Elle est également pourvue d’une biodiversité très riche composée de beaucoup d’écosystèmes différents qui abritent de nombreuses espèces endémiques. Le revers de la médaille est que cet environnement est profondément menacé, et des projets dangereux pour l’environnement y sont planifiés et accomplis. Heureusement, le mouvement bosniaque pour la protection de l’environnement se développe depuis quelques années et travaille avec ardeur en faveur de la préservation de la nature et de l’amélioration de la justice sociale. Le Centre pour l’Environnement (CZZS) est la plus grande organisation pour la protection de l’environnement de Bosnie-Herzégovine, basé dans la ville de Banja Luka. Il a été fondé en 1999, avec pour idéal une société juste qui agirait de manière responsable en harmonie avec la nature. C’est une organisation non gouvernementale, non partisane et à but non lucratif qui emploie actuellement vingt personnes de différentes professions et réunis quinze bénévoles, pour la plupart des étudiants.

Le travail de l’équipe du CZZS s’organise autour de trois programmes qui concentrent la majorité des actions : la biodiversité et les zones protégées, les transports et l’énergie. S’ajoutent à cela des activités adjacentes autour de la gestion des déchets, d’une campagne anti-OGM, de la sécurité des activistes environnementaux, etc. Tout a commencé avec la nature A travers le programme pour la biodiversité, l’équipe de biologistes, écologistes et juristes du CZZS travaille à l’élargissement des zones protégées (actuellement, moins de 4% du territoire entier est protégé) et à une gestion transparente et raisonnée des ressources naturelles et des zones protégées. Le travail du CZZS se concentre sur la préservation des écosystèmes qui subissent le plus de pression comme les forêts, les rivières, les zones humides et un type d’écosystème particulier nommé karts poljes, mais aussi sur la conservation des grands carnivores (loup, ours et lynx) et le combat contre les plantes invasives.

L’énergie est toujours un problème

L’un des principaux problèmes environnementaux en Bosnie-Herzégovine est lié au système énergétique. Le CZZS se bat contre les projets énergétiques délétères et leur impact négatif sur l’environnement, la santé et l’économie. Ce combat inclus des actions de plaidoyer dans le secteur énergétique contre les centrales hydro-électriques, les centrales à charbon et les projets analogues Viser un futur renouvelable et durable

La Bosnie-Herzégovine possède encore cinq grande centrales thermoélectriques fonctionnant au charbon qui fournissent la majorité de l’électricité du pays (soit jusqu’à 72%). Les grandes centrales hydroélectriques sont la deuxième source d’énergie principale et dispensent environ 25% de l’électricité du pays. En comparaison, les sources d’énergies durables et renouvelables (solaires, éoliennes) sont négligeable, comptant pour moins de 5%. Un fait très important pour le pays est que près d’un quart de l’électricité produite est exportée. Cette énergie vient du charbon et est vendue aux pays de l’Union Européenne pour un prix inférieur à celui des énergies renouvelables. La Bosnie a une importante transition énergétique devant lui, mais peu d’actions sont prises sur le terrain, il n’y a pas de vision et de stratégie claire pour la Bosnie. Le but du CZZS est de rendre la transition énergétique juste et responsable sur le plan social pour que les 17 000 personnes qui sont actuellement employées dans les mines de charbons et les centrales thermiques ne soient pas laissées pour compte. Le CZZS se concentre sur la promotion de véritables sources d’énergies renouvelables (solaires et éoliennes) et sur le soutien à des exemples positifs de production d’énergie citoyenne pour amplifier la décentralisation et la démocratisation de la production énergétique.

Liberté aux rivières

Le CZZS travaille avec des habitants et des organisations partenaires depuis plus de dix ans pour contrer les projets de grandes et petites centrales hydroélectriques en Bosnie-Herzégovine ; en particulier le grand nombre de petites centrales hydroélectriques qui présentent une grande menace pour la nature, mais aussi pour les moyens de subsistance des habitants des environs. Ces centrales sont délétères parce qu’elles sont surtout construites en amont de petites rivières de montagnes, où elles détruisent l’environnement en causant de l’érosion et de la déforestation. Elles bouleversent l’écosystème de la rivière entière ainsi que la vie des communautés locales. La majorité de ces centrales sont construites grâce à des investissements privés, ce qui fait qu’elles n’assument aucune responsabilité sociale et n’investissent pas dans ces communautés essentiellement rurales. Elles ne créent aucun emploi car les petites centrales hydroélectriques sont opérées à distance et les seules infrastructures construites sont destinées aux machines, qui dans certaines cas détruisent également les infrastructures préexistantes, par exemple les routes. En outre, elles produisent des quantités d’énergie insignifiantes et ne sont profitables que parce qu’elles sont subventionnées par les contribuables. Foncièrement, le système fait payer la population pour que la nature et les communautés soient détruites, tandis que des individus font du profit.

Heureusement, beaucoup de courageux habitants ont défendu leurs rivières et de nombreux activistes, scientifiques, pêcheurs et bien d’autres les ont rejoints et ont créé une Coalition pour les rivières en Bosnie-Herzégovine, qui réunit plus de trente organisations des quatre coins du pays. La coalition a été en mesure de se faire entendre des autorités, qui sont actuellement en train d’interdire la construction de nouvelles mini centrales hydroélectriques.

La situation est pratiquement la même dans toute la région, des données de 2020 indiquant un nombre stupéfiant de 3 431 centrales hydroélectriques qu’on planifie de construire à travers les Balkans dans les prochaines années. Ce phénomène a reçu le nom de « tsunami » de centrales hydroélectriques, et le mouvement régional pour la protection des rivières porte celui de Sauvons le cœur bleu de l’Europe (Save the Blue Heart of Europe).

Se déplacer de manière renouvelable Ne souhaitant pas négliger l’une des activités les plus polluantes, une partie de l’équipe du CZZS s’occupe des enjeux liés aux transports ainsi qu’à la croissance et de l’organisation des espaces urbains. Le programme des transports promeut des moyens de transport durables ainsi que le changement des habitudes de transport des habitants des zones peuplées. Alors que l’urbanisation s’accélère de plus en plus et que le nombre de véhicules motorisés augmente nettement, le pays a besoin d’une participation active de la population dans le développement du plan urbain, de davantage d’infrastructures cyclistes et piétonnes, d’une amélioration des transports publiques et d’une promotion du vélo, ainsi que d’autres moyens de transport non-motorisés. De plus, les villes ont plus que jamais besoin de préserver et promouvoir leurs espaces verts, ainsi que différents types d’espaces publiques.