L’eau, la terre et les semences sont des ressources naturelles vitales qui font partie, en Afrique comme ailleurs, de l’héritage commun. Ce sont des biens communs et pas des marchandises. Elles doivent être sécurisées, préservées et gérées par les communautés pour le bien commun des sociétés et de l’environnement, aujourd’hui et pour les générations à venir. En Afrique, environ 70% de la population dépend de l’agriculture familiale paysanne. L’accès sécurisé et le contrôle de la terre, de l’eau, des forêts et des semences sont donc des facteurs vitaux pour les communautés et doivent être respectés et protégés, en tant que droits. C’est la condition des droits humains, y compris le droit à une alimentation adéquate et à la nutrition, le droit à l’eau et à l’assainissement, le droit à la santé, le droit à la culture, le droit au logement, le droit au travail et le droit à la libre détermination des peuples.

Pourtant, en Afrique, la mainmise sur les ressources naturelles par des entreprises, des gouvernements, des élites, des spéculateurs, souvent soutenus par la Banque mondiale, le Fonds Monétaire International (FMI), les pays industrialisés et d’autres institutions et consortiums continue de s’aggraver. Cela se fait au nom de la sécurité alimentaire, de la protection de l’environnement, sous prétexte de limiter les effets du changement climatique, de produire de l’énergie « propre », des mégaprojets d’infrastructures, et/ou au nom du soi-disant « développement », et qui sont promus par des partenariats public-privé. Cette dynamique engendre la concentration des ressources dans les mains de quelques acteurs puissants, l’expulsion des communautés et l’asservissement des populations. Des territoires entiers sont vidés de leurs communautés, tandis que la perte d’identité et la destruction des écosystèmes rendent la vie impossible.

Les accords commerciaux et d’investissements internationaux, tels que les Accords de Partenariat Economique (APE), aggravent les inégalités entre les pays et empêchent les mesures de sauvegarde pour la population, en particulier des groupes marginalisés, ou déjà défavorisés, comme les femmes, les jeunes et les enfants. Les projets de développement internationaux et les activités des sociétés transnationales sont devenus des facteurs de plus en plus importants et nuisibles pour les ressources naturelles et la vie des communautés en Afrique, et dans d’autres régions du monde. D’ailleurs, une grande partie de la responsabilité en incombe à certains gouvernements africains, aux autorités locales, mais aussi aux entités régionales et sous-régionales, comme l’Union Africaine, la CEDEAO (Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest), et l’UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine). Les lois et les politiques développées et approuvées par ces gouvernements et ces institutions perpétuent et aggravent les inégalités et la marchandisation des ressources.

Des communautés et des organisations de base de l’Afrique de l’Ouest s’organisent pour résister et faire valoir leurs droits. Cela s’est manifesté, en particulier, dans les forums sociaux mondiaux africains, à Dakar et Tunis. D’abord la déclaration intitulée : « Droits à la terre et à l’eau, une lutte commune », ainsi que dans la « Déclaration de la Convergence Globale des luttes pour la terre et l’eau », qui constitue le socle de la Plateforme qui porte le même nom, créée en 2015, et constituée de 300 organisations paysannes et de victimes d’accaparement de leur terre et de l’eau. Elle a trouvé sa traduction médiatique en mars, par l’organisation, passant par 15 pays, de « la Caravane ouest-africaine pour faire valoir les droit à la terre, à l’eau et aux semences ». Une bien belle mobilisation !