Quand le C.C.F.D.-Terre Solidaire parle de ses partenaires de développement dans les pays du Sud, il s’agit toujours d’acteurs du développement de leurs propres communautés ou région, et qui mettent en œuvre, par eux-mêmes, dans le cadre d’associations ou d’organisations, les moyens nécessaires pour vivre dans la dignité. C’est le cas, au Chiapas, au Mexique, de l’ONG D.E.S.M.I., Développement Economique et Social des Mexicains Indigènes, qui travaille à promouvoir les droits des populations du Chiapas et de nouveaux modes de développements agricoles. Le mieux, aujourd’hui est de laisser la parole à Rigoverto Albores Serrano, un agronome de l’association qui est en charge du suivi des programmes mis en place.

« Nous travaillons avec des groupes de paysans de l’Etat du Chiapas, au Sud du Mexique, qui se trouvent sur trois types de propriété foncière. Dans les plaines, ce sont les « ejidos », des terres communautaires dont chacun reçoit une parcelle ; dans les zones montagneuses, c’est une propriété collective dans des biens communaux, où chacun ne reçoit guère plus d’un demi -hectare; ou alors, en troisième lieu, c’est la petite propriété individuelle. Mais les petits propriétaires subissent la pression des agroindustriels ou des multinationales qui prônent la monoculture, c’est pourquoi les terres « ejidos » sont en danger en raison d’un programme gouvernemental de certification qui pousse vers l’individualisation de cette propriété collective, sous le couvert de garantie de prêt. Mais si le paysan ne peut pas rembourser son crédit, sa terre peut être saisie. L’autre risque est que ces paysans signent des contrats avec des multinationales pour se lancer eux aussi dans la palme africaine, le soja transgénique, le jatropha ou l’eucalyptus. Pour faire de l’agro-carburant ou pour la cellulose. Or, dans les régions de monoculture, l’utilisation massive de glyphosate et du Roundup ont provoqué une hausse des cas d’hydrocéphalie, de cancers du sein, de la prostate, du foie et des insuffisances rénales chroniques. Par ailleurs, la culture industrielle remplace les cultures nourricières, et les paysans se tournent vers une alimentation industrielle. L’usage des pesticides et le changement drastique alimentaire ont des conséquences désastreuses sur les populations locales.

Notre ONG D.E.S.M.I. –Développement Economique et Social des Mexicains Indigènes – intervient dans les communautés autonomes zapatistes qui bénéficient en propre d’une structure politique d’administration, de santé, d’éducation et d’agro-écologie. Nous proposons des formations techniques pour aider les paysans à produire leur compost et leurs propres biofertilisants, pour apprendre à diversifier leur système de production et à régénérer la terre utilisée. La terre est alors respectée comme mère nourricière et les relations entre la nature, les personnes, les générations, les hommes et les femmes participent de cette vision globale du territoire. Nous travaillons aussi avec des paysans engagés pour le changement des pratiques, cherchant à construire un modèle alternatif au modèle ultra libéral, prédateur et agressif.

C’est donner un autre sens au mot « économie » que celui du système néocapitaliste ; celui-ci ne considère l’économie que comme l’accumulation du capital et son contrôle. Pour nous, c’est la signification étymologique de « la gestion du foyer ». Il faut donc construire un système responsable pour administrer cette grande maison, prenant soin, comme dit le pape François dans son encyclique de « la maison commune » qu’est la Terre. C’est donc tout un système de pensées qu’il faut reconstruire. Un autre monde ! ». Pour nous occidentaux, une autre forme d’économie qui peut nous inspirer, et nous faire entrevoir d’autres perspectives que celles que nous pensons s’imposer !