Un projet de règlement de la Commission européenne a émergé en mars 2014 sur l’approvisionnement responsable en minerais depuis les zones de conflit ou à haut risque. Un vote est prévu en Commission du commerce international pour la mi-avril, avant un vote en plénière du Parlement européen prévu pour le mois de mai de cette année 2015. Depuis longtemps bon nombre d’O.N.G., dont le C.C.F.D.-Terre Solidaire mènent un plaidoyer au niveau européen contre ce que l’on appelle « les minerais du sang », ces minerais dont l’exploitation et le commerce sont susceptibles de financer et d’alimenter les conflits, et les violations des droits humains. Le problème est préoccupant dans bon nombre de pays en développement, et spécialement en République Démocratique du Congo.
La situation y est particulièrement complexe. Les nombreux groupes armés qui sévissent dans la région sont animés par des intérêts économiques, sociaux, politiques et sécuritaires. L’implication du Rwanda et de l’Ouganda, et dans une moindre mesure du Burundi, alimentent l’insécurité. Si les gouvernements de la région reprochent aux autorités de la République Démocratique du Congo (R.D.C.) de ne pas assez contrôler son territoire, la responsabilité de ses voisins se pose aussi. En effet, les rebelles du M23 dans le Nord-Kivu ont été fortement soupçonnés d’être armés et financés par le Rwanda et l’Ouganda et d’être impliqués dans les trafics de minerais (étain et coltan) extraits de cette région de R.D.C. qui leur est frontalière. Et malgré sa déroute militaire de fin 2013, le M23 pourrait renaître de ses cendres. Car le Rwanda ne semble pas s’impliquer dans les Conférences internationales sur la région des Grands Lacs, et maintien sa pression militaire sur l’est de la R.D.C., sous prétexte de régler par la force la présence des Forces démocratiques de Libération du Rwanda, ces anciennes milices hutues, instigatrices du génocide, qui se sont réfugiées en 1994 sur l’est de la République Démocratique du Congo.
Du coup, l’adoption future d’une législation par la Commission européenne contre « les minerais du sang » dans le contexte de la région des Grands Lacs est plus que nécessaire. Mais le texte proposé actuellement en cours pour adoption, est jugé très insatisfaisant pour la société civile européenne par l’intermédiaire des O.N.G., ainsi que pour les partenaires qui sont sur le terrain au Congo comme la Conférence épiscopale nationale du Congo, et ce pour trois raisons. D’abord, le texte en l’état actuel reste non contraignant, puisqu’il préconise un mécanisme volontaire pour les entreprises utilisatrices de ces minerais, qui peuvent choisir ou non de faire la lumière sur leur chaîne d’approvisionnement. Ensuite, ce texte est très restreint au niveau de son champ d’application. Il concerne trop peu d’entreprises et de ressources – étain, tantale, tungstène et or. Il serait bon d’y inclure le cuivre et les pierres précieuses qui posent problème, en Birmanie par exemple. Enfin, ne sont concernées que les entreprises qui importent ces minerais sous forme brute, et sont exclues du projet de règlement toutes les entreprises qui importent des produits finis tels que les téléphones portables contenant ces minerais et les mettent ensuit sur le marché européen.
Le plaidoyer mis en place pour améliorer le texte et pallier ces insuffisances notoires est de plusieurs niveaux. Tout d’abord il s’appuie sur les bénévoles d’associations qui interpellent les eurodéputés ciblés en raison de leur appartenance aux trois commissions parlementaires impliquées sur le projet de règlement sur les minerais des conflits, à savoir : Commerce international, Affaires étrangères et Développement. D’autre part une déclaration de 135 évêques de 37 pays, dont 20 en France, se positionne en ce sens. Enfin Amnesty International, Sherpa, le C.C.F.D.-Terre Solidaire et d’autres O.N.G. invitent le gouvernement français à pousser les autorités à prendre des positions fortes contre les minerais du sang. Un engagement que chacun à sa mesure est invité à relayer, jusqu’à signer des pétitions.