Témoignage
Je voudrai simplement porter le témoignage collectif de tout le CCFD-TS de Côte d’or, qui tient à dire à la fois sa tristesse , mais surtout son affection à Paulette , et sa reconnaissance pour tout le travail fait ensemble. Mon témoignage déborde largement ce que j’aurai pu dire en tant qu’ancien président de 2000 à 2007 du CCFD de Côte d’Or. J'ai tissé ensemble plusieurs contributions : C’est pour nous l’occasion de nous rappeler que Paulette appartient au tout début de l'histoire de ce mouvement d’Eglise en côte d'or, à une époque où il s’appelait seulement CCFD, il n’était pas encore TS. Avec quelques personnes convaincues, Anne, Antoine et Noëlle, Louis et Madeleine, Thérèse et Alain je ne cite que ceux que j’ai connus mais d’autres certainement, plus tard Christiane, Paulette avait fait vraiment démarrer le CCFD sur la Côte d’or. « Elle ne voulait pas être une présidente potiche » se souvient Anne. Avec un aumônier de choc également , François Patriat, lui aussi parfois à l’étroit dans son Eglise diocésaine, ils avaient voulu élargir leur charité aux dimensions du monde, leur charité, mais du coup aussi leur foi et leur espérance…C’est une autre époque, nous sommes au milieu des années 80…Cet élargissement politique de la solidarité ne va pas de soi dans l’Eglise. D’ailleurs il est très contesté, et le CCFD mis en cause dans des campagnes de presse qui laisseront des traces, la méfiance chez certains, des blessures chez d’autres. Je pense que quelque chose comme une blessure a du accompagner Paulette très longtemps, quand elle disait à propos d’une paroisse.. « oh, là le curé n’est pas très CCFD.. ». Un peu de tristesse cachée, de constater que ce à quoi elle croyait le plus ne soit pas accueilli, fasse l’objet d’hostilité ou pire d’indifférence. En attendant, il faut dire c’était déjà une très belle époque de la solidarité : Paulette est présidente du CCFD de Côte d’or quand il accueille B.Holzer en 1986 ou 7, avec de nombreux partenaires pour les 25 ans de l’association.
C’était aussi une époque de prospérité des mouvements d’Eglise sur lesquels pouvait s’appuyer le CCFD : ACO, ACI,CMR , ACE tous les mouvements de la collégialité et Paulette avait elle-même cette culture quand elle évoquait son appartenance à l’ACGF…Passer de l'ACGF au CCFD c'était quand même quelque chose...Avec son style personnel, certains m'ont dit que Paulette donnait du sérieux et de la respectabilité au CCFD, donc de la crédibilité.
Paulette est une femme aussi , et c’est important dans une des rares associations d’Eglise où les hommes sont majoritaires. Je cite Monique : Je me souviens de la nomination de Paulette à la présidence du CCFD. J'étais fière qu'une femme soit élue, c'était rare à l'époque où l'on voyait surtout des hommes s'intéresser aux questions du développement international et j'ai pensé que cet engagement important allait forcément bouleverser sa vie quotidienne et donc sa vie spirituelle. Je l'ai admirée d'être jusqu'au bout de sa vie animée par les causes soutenues par le CCFD Terre Solidaire, signe d'une conscience toujours éclairée.
Paulette a arrêté sa présidence en 1995 pour passer la main à Bertrand du MCC. L’aumônier aussi avait changé. Une autre personnalité, Dominique Nicolas. Je pense qu’il a fallu bien du caractère, mais aussi de la diplomatie, de la patience à Paulette pour travailler avec ces aumôniers successifs, eux qui reconnaissaient en retour comment c’était important pour leur ministère de prêtre que de faire l’expérience d’aumônerie du CCFD. A commencé alors pour Paulette un autre type de présence au CCFD : au bureau, dans les permanences d’accueil. Il me semble qu’elle a quand même été un peu décontenancée par l’évolution technologique qu’a connue le CCFD, comme toutes les associations de l’époque : l’informatique, la communication, la professionnalisation . Je crois qu’elle a pensé, et ce n’était pas la seule , que ce n’était plus tout à fait le même CCFD que celui qu’elle avait porté. Mais elle s’est adaptée en approfondissant ses propres compétences : je souligne notamment sa disponibilité c’est à dire présence physique dans des permanences qui permet d’avoir quelqu’un en face de soi, c’est à dire son consentement à animer de multiples réunions d’acteurs du CCFD, pour présenter les outils de Carême, la campagne d’année etc. Pas besoin d’ordinateur pour tout cela : Christiane me rappelait qu’elle était capable de retrouver en un instant n’importe quel article ou document utile, qu’elle avait la mémoire de toutes les rencontres , et qu’elle se souvenait du nom d’un improbable militant CCFD de l’arrière pays beaunois ou de la Montagne qui avait participé 10 ans avant à une obscure rencontre de Carême, ou à une de ces grandes journées populaires , Terre d’Avenir ou autre. Je laisse la parole à jean-Pierre :
J'ai surtout pratiqué Paulette dans l'équipe "accueil" du CCCFD-Terre Solidaire 21. Toujours vive, alerte, entreprenante, prête à bouger, prête à assumer une responsabilité si nécessaire. Même prête à se mettre à la base de données Alizé alors qu'elle n'avait jamais pratiqué l'informatique. Très impliquée pendant longtemps tant au CCFD-Terre Solidaire qu'à Artisan du monde.
Je voudrais évoquer un souvenir plus personnel, qui remonte à une époque entre 2000 et 2005, et qui me touche beaucoup quand j'y repense. C'est que j'ai fréquenté Paulette dans un autre cadre. J'avais une casquette professionnelle, et elle représentait le CCFD dans une structure de l'Education nationale au Rectorat de Dijon, qui s’appelait Commission académique pour l’Éducation au développement et à la francophonie. C'est à dire qu'elle était sortie de la maison diocésaine et participait à des rencontres « laïques » où elle témoignait de la compétence du CCFD quant à sa pédagogie et aux outils d'animation disponible. Pour l'avoir expérimenté, je sais que ce ne sont jamais des réunions confortables que de devoir présenter le CCFD en milieu hostile. Ce n'est pas anecdotique : Paulette n'avait pas encore lu l'encyclique de notre pape François , mais elle acceptait d'aller aux périphéries, de sortir de ses sécurités. A partir de là, Jean-Claude me le rappelait hier, elle proposera aux équipes locales d'intervenir dans le cadre de la SSI dans des collèges, écoles bibliothèques. Les dispositifs mis en place à l'époque fonctionnent toujours à Quetigny, et c'est à partir d'une rencontre initiée par Paulette. Dans ce milieu laïc, elle avait su convaincre beaucoup de monde, par sa ténacité, mais aussi sa discrétion et donc une certaine légèreté.
En parlant de Paulette, je ne voudrai pas oublier Michel. J’ai souvent remercié le CCFD d’être un lieu où il était possible de s’engager en couple, et il y a beaucoup d’exemples de leur genre. S’engager ensemble avec des compétences et des charismes différents. Michel semblait plus dans la logistique, Paulette dans la gouvernance et la communication mais on savait qu’ils portaient à deux l’avenir de l’association. Et je trouve que c'était une formidable bonne nouvelle que de montrer qu'on pouvait s'engager à deux, que l'engagement ne volait pas du temps à l'autre.
En concluant, je ne peux m’empêcher de souligner à nouveau ce trait de la personnalité de Paulette : la discrétion. Elle n’était pas, sauf peut être à une certaine époque, dans l’exubérance, ni dans l’emballement, mais davantage dans la retenue . Y compris au niveau de sa foi. Didier Thomas, l’actuel président du CCFD m’écrivait ceci : Effectivement j'ai toujours été marqué par le dévouement et la volonté de Paulette, sans aucun doute guidée par une grande Foi en Dieu. Personnellement, je ne sais pas trop qu’elle était cette foi, comme je le disais, elle semblait retenir les mots pour la formuler. Mais elle était sensible à cette dimension spirituelle de l’engagement solidaire. Longtemps elle avait tenu à ce que le CCFD organise avec l’évêque l’entrée en Carême , pour vivre la dimension diocésaine de notre solidarité, pour entraîner l’adhésion des prêtres locaux. Paulette était de celle qui faisait que le CCFD était plus qu’une ONG. C’était important aujourd’hui de dire la dette que toute une génération de militants a sans le savoir vis à vis de Paulette.. Merci à toi, Paulette d’avoir rendu possible ce lieu de de fraternité, de décentrement de soi, ce lieu de foi où s’impliquent aujourd’hui de si nombreux cote-doriens.
PS : je n'ai pas parlé des autres engagements de Paulette. Michel Férot lors de la célébration a témoigné pour Artisans du Monde. Il aurait peut être fallu dire aussi quelques mots sur l'attachement profond de Paulette et Michel à Corcelotte, ce petit hameau de l'Auxois, ou une communauté vivait autour de François Patriat une espérance enracinée dans Vatican 2 et revitalisée par Mai 68. Pendant 20 ans, se sont succédés les WE, les rencontres du dimanche sur des thèmes de société et d'Eglise avec des invités souvent prestigieux (Jacques Gaillot, Daniel Duigou, Bruno Latour, sont venus, je m'en souviens) et toujours disponibles pour aider la « communauté » à inventer un avenir aussi bien pour l'Eglise que pour le milieu rural. Paulette était l'une des chevilles ouvrières de ces rassemblements, elle donnait à manger aux foules affamées, c'est très évangélique, tout cela aussi par sa grande complicité avec François Patriat.. Sur la fin, elle avait pris un peu de distances, ce qui explique que ce ne soit pas là que je l'ai rencontrée prioritairement.
D'après les notes de Pierre Durand, avec les contributions de Anne Descreux, Christiane Joannet, Thérèse Richard, Monique Petit, Didier Thomas, Jean-Pierre Pilverdier, Jean-Claude Fresse.