Espace Rencontre, 13 mai 2013



 

Le grand rassemblement pour la solidarité internationale, Diaconia, a attiré des milliers de personnes et parmi elles, un personnage incontournable de la sensibilité humaine. Guy Aurenche, ancien avocat de la cour d’appel de Paris, spécialiste du droit civil et pénal, militant des droits de l’homme, président d’honneur de la fédération internationale de l’action des chrétiens pour l’abolition de la torture, chevalier de la légion d’honneur et actuel président de l’ONG CCFD Terre Solidaire, a échangé lors d’une rencontre à Lourdes.

Qu’espérez-vous de ce rassemblement ?

« Tout d’abord, qu’il rappelle à tous que la dimension fraternité n’est pas un accessoire pour les chrétiens. Il s’agit d’un engagement dans la société. Il faut arriver à ce que l’organisation dans les diocèses se définisse en vrai programme de solidarité, que tout le monde ait sa place et cela ce n’est pas gagné. Prendre la solidarité dans toute sa dimension, y compris à l’international, demeure difficile. Pourtant la France ne règlera pas ses problèmes  seule, nous devons penser « international » pour y arriver » explique-t-il. « Les pratiques françaises ont des conséquences dans les pays du sud et nous ne pensons pas à cela. On détruit ailleurs pour régler nos problèmes et ici nous consommons déjà bien au dessus de nos moyens. Par exemple, pourquoi chercher de nouvelles sources d’énergie ? Ce n’est pas forcément la bonne solution ! Faut-il donc toujours augmenter notre consommation ? » ajoute-t-il. Effectivement, ne sommes nous pas allé trop loin ?

La solidarité tend à disparaître face à l’individualisme, quel est votre sentiment à ce sujet ?

« Je ne suis pas d’accord. Les gens veulent réussir leur vie et là je parlerai plutôt d’individualité. Lorsque l’on propose des actions simples de solidarité, ça fonctionne. Bien sûr ils ne militent pas comme nous, ils vivent différemment la solidarité et la famille. Cette dernière reste un point de repère même si elle est dispersée. De plus il y a une forte croissance de demandes de départs pour les voyages en immersion à tel point que nous devons en refuser ». Dans ce monde qui change, Guy Aurenche convient « la société est plus dure pour les gens, il faut défendre sa peau ».

Comment voyez-vous le devenir de la société humainement parlant ?

« Je ne suis ni optimiste, ni pessimiste, ces deux mots ne veulent rien dire. Il faut trouver la capacité d’être aux côtés de ceux qui n’acceptent pas l’inacceptable. Il y a une chose simple à faire, parler, briser la solitude c’est déjà une première victoire sur la misère et la pauvreté et cela n’est pas réservé à des spécialistes. Tout le monde peut le faire dans son quartier. C’est peut-être dans l’alliance que je logerai le mot optimisme. En se regroupant avec les autres on trouve des solutions. J’ajoute que chez les jeunes il y a des appétits de solidarité ».

Vous êtes un défenseur des droits de l’homme, quel est le droit le plus important ?

« La dignité. Si je reconnais une valeur dans la dignité, je m’interdis de la déshumaniser. On approche les gens à travers ce qu’il leur manque, par exemple les sans papiers, les sans domiciles fixes ou bien d’autres encore. On torture quelqu’un qui a été étiqueté et qui n’est donc pas considéré comme un être humain. Nous ne devons pas nous enfermer dans ce geste mais être capables de reconnaître des valeurs à une personne qui a un comportement dérangeant. La dignité commence à l’école, dans les relations, dans le quotidien, dans la vie » affirme-t-il.

 « Aujourd’hui, l’argent se positionne au détriment de l’humain. Un être humain ne peut pas être traité comme une chose, hélas un bon tiers l'est » constate Guy Aurenche.

 

Sandrine Le Lay.