D'abord s'inscrire, comme dans une vraie bibliothèque.
Et attendre son tour, car ici, les « Livres » sont très demandés : uniques, rares et souvent « en langues étrangères », ce qui nécessite pour bien des visiteurs l'entremise d'un traducteur bénévole.
L'ambiance est feutrée, mais ici, pas de livre ni de rayonnage, ce sont des humains qui se « livrent » au cœur de petits cercles intimes formés d'une demi-douzaine de fauteuils et de chaises.

Jeudi 10 décembre 2015, le CCFD Terre solidaire tenait « bibliothèque humaine » au centre culturel Centquatre, qui accueillait à Paris, du 7 au 11 décembre 2015, les mobilisations citoyennes pour le climat pendant la COP21.
« C'est une pratique d'animation inspirée d'une expérience danoise, visant à favoriser le respect et la qualité de la rencontre entre le public et un “témoin” », explique Solène Clavel, du CCFD-Terre Solidaire Paca.

Disposés à partager « à livre ouvert » sur les conséquences du dérèglement climatique sur leur pays, leur vie, et leur activité, une quinzaine de partenaires du CCFD-Terre Solidaire se racontent patiemment.
Il y a la Guatémaltèque Neydi Morales, le Timorais Jenito Santana, le Birman Bobo Lwin, la Philippine Myrna Dominguez.
Le Palestinien Jihad Abdo, confesse que le réchauffement en tant que tel est secondaire pour son peuple, dont la réalité quotidienne est d'abord conditionnée par la domination israélienne. Il suggère cependant une sorte de solidarité climatique. « Faire pression dans vos pays sur les entreprises qui tirent parti de nos difficultés, ça peut contribuer à améliorer notre sécurité alimentaire, également mise à mal par l'impact du dérèglement sur notre agriculture. »
Le Chinois Wang Canfa témoigne de la catastrophe environnementale et sanitaire urbaine provoquée par les émissions de polluants atmosphériques dus à la combustion du charbon, étonné par l'effervescence citoyenne autour de la bataille climatique. « Vous êtes des “dingues” du climat, ici ! On n'en est pas encore là, en Chine… »

Solène a disposé un livre d'or de la bibliothèque qui est resté allumée tard dans le jour déclinant qui assombrit la verrière du Centquatre.
Un parent accompagné d'enfants remercie l'Ivoirien Alain Zouzou, « super livre particulièrement adapté à un jeune public », plaisante-t-il.
Un visiteur se surprend à la richesse des échanges, « si constructifs », et appelle à « d'autres bibliothèques humaines portant sur d'autres sujets, car le message est très clair ! ».
Un « fascinating process », salue un lecteur anglophone, qui signale n'avoir jamais fréquenté auparavant de lieu de cette nature.

Patrick Piro



bibli_vivante.jpg ©Patrick Piro / CCFD-Terre Solidaire