Sur le site internet du C.C.F.D.-Terre Solidaire, Lucie Watrinet, chargée de mission Plaidoyer pour le Financement du Développement, évoque quelques aspects importants de l’action de l’organisation dans ce domaine, de concert avec d’autres O.N.G., et ce depuis de nombreuses années. Les « Panama papers » confirment l’urgence de lutter contre l’évasion fiscale. Laissons-lui la parole :

« Il y a un mois maintenant, le 16 mars dernier, nous avons publié au C.C.F.D.-Terre Solidaire, avec Oxfam-France et le Secours Catholique, un rapport sur la présence des banques dans les Paradis fiscaux. C’est un rapport qui se base sur des données qui ont été publiées pour la première fois, l’année dernière, des données que les banques sont désormais obligées de fournir au grand public sur leurs bénéfices, leurs chiffres d’affaires, leurs nombres d’employés, les impôts qu’elles payent, et dans tous les pays où elles sont présentes. On en tire trois conclusions, trois hypothèses, de cette présence particulière des banques dans les paradis fiscaux : soit elles y sont pour échapper elles-mêmes à l’impôt, soit elles y sont pour permettre à leurs clients d’échapper à l’impôt, soit elles y sont pour mener des activités lucratives hautement risquées qui peuvent mettre à mal le système financier mondial. Il faut la transparence ; ce n’est pas possible de continuer de permettre l’utilisation de ces sociétés écrans ; et donc une de nos recommandations au niveau européen, c’est la création d’un registre public des propriétaires réels de ces sociétés écrans. »

Et Lucie Watinet de poursuivre sur la future loi dite loi Sapin 2 : « Si l’on veut avoir une vision large des problèmes de la fraude et de l’évasion fiscale, il ne faut pas oublier les entreprises qui sont quand même celles qui font perdre le plus, proportionnellement, d’argent aux Etats, en évitant de payer leurs impôts de manière plus ou moins légale ; et là-dessus on a un rendez-vous important en France, avec la loi de transparence dite loi Sapin 2, qui va arriver au Parlement à la fin du mois de mai. Et là, nous allons pousser très fort pour que le gouvernement s’engage à exiger des entreprises qu’elles soient beaucoup plus transparentes, comme les banques ; qu’elles soient obligées de publier des informations dans tous les pays où elles sont implantées, de manière à ce que, enfin, on puisse savoir si les impôts qu’elles payent correspondent à leurs activités réelles ; et cela c’est le sens également de notre demande et de notre combat contre l’évasion fiscale des entreprises. »

Lucie Watrinet aborde ensuite la mission, le rôle important et le statut de ceux que l’on appelle les lanceurs d’alerte : « On nous interpelle très souvent sur les lanceurs d’alertes ; parce que là, encore une fois, toutes ces données on les doit à une seule personne, un seul citoyen qui a pris son courage à deux mains et qui s’est dit : « moi je trouve tout cela scandaleux », et qui les a données à un journal allemand, qui ensuite a fait appel au consortium de journalistes. On a besoin des lanceurs d’alerte, on a besoin des journalistes ; il faut les protéger, et ça c’est aussi un chantier qui est à travailler ici en France ». Enfin, Lucie Watrinet aborde les conséquences de cette évasion fiscale pour les pays en développement : « Les grands oubliés, à notre sens, de cette lutte, sont les pays en développement, parce que les pays en développement sont proportionnellement les pays qui perdent le plus à cause de ces pratiques, et que c’est autant d’argent qui pourrait leur servir à justement se développer, développer des services publics de qualité. La lutte contre l’évasion fiscale ne devrait pas être traitée simplement au sein de ce club de pays riches qu’est l’O.C.D.E. ; elle devrait inclure tous les pays du monde, et en particulier ceux qui en ont le plus besoin ! ». Voilà un message qui montre toute l’ampleur du problème : raison de plus pour s’informer et exiger des mesures radicales et efficaces !